Seize États, au premier rang desquels la France, soutiennent les viticulteurs qui s’opposent à la directive européenne de 2008 portant libéralisation de la gestion des vignes en 2016 (avec une extension possible jusqu’en 2018) mais à laquelle sont favorables les négociants, tels que l’Association générale des entreprises vinicoles (AGEV) et le Comité européen des entreprises vins (CEEV). Si le lobbying a commencé à porter ses fruits, les nouvelles propositions de la Commission européenne ne satisfont pas les professionnels de la production de l’un des « vecteurs de la civilisation européenne » (AREV).
Lors de la réunion du 21 septembre du groupe de haut niveau chargé du dossier, le directeur général chargé de l’Agriculture à la Commission européenne, José Manuel Silva Rodriguez, a évoqué le maintien d’un système « souple et non restrictif» de contrôle des vignobles impliquant les producteurs. Rappelant l’enjeu concurrentiel avec les producteurs non soumis à ces contraintes, il n’entend pas abandonner la réforme. La libéralisation aurait lieu pour les vins sans indication géographiques (VSIG) sous réserve d’une clause de sauvegarde en cas de déséquilibre du marché (dépassement de seuils de production préétablis). Quant aux appellations d’origine contrôlée (AOC) et aux indications géographiques protégées (IGP), il propose de déléguer leur gestion, soumise à l’accord des autorités publiques, aux acteurs économiques de la filière. Les États n’auraient pas l’obligation de souscrire à ce système qui implique la fin des restrictions nationales ou régionales « afin d’éviter toute distorsion de concurrence ».
Si la Fédération européenne des vins d’origine (EFOW), la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux-de-vie de vins à appellations d’origine contrôlée (CNAOC) ainsi que la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et les Jeunes agriculteurs (JA) saluent « un premier pas », ils réclament une régulation du potentiel de production appliquée à tous les segments du marché. Selon Riccardo Ricci Curbastro et Bernard Farges (présidents d’EFOW et de la CNAOC) « il n’y aurait rien de pire que de prévoir un régime différent entre les vins AOC et IGP et les VSIG. » Ils considèrent que le système aboutirait « à un développement incontrôlé de la production de VSIG et à une industrialisation du secteur » et menacerait les vins AOC et IGP, qui « deviendraient une réserve d’indiens ». Le chemin semble encore long jusqu’à un consensus qui devra être formalisé lors de la dernière réunion prévue le 23 novembre prochain.
Anne-Laure Chanteloup