François Hollande s’est rendu à Moscou ce jeudi 28 février pour sa première visite officielle en Russie. Reçu par le président de la Fédération de Russie, il a abordé les « prometteuses » relations franco-russes ainsi que les questions internationales sur lesquelles les deux pays « progressent » selon lui.
Les relations économiques et les investissements « peuvent progresser »
Lors de la conférence de presse commune, François Hollande a évoqué les relations économiques entre la France et la Russie, dont les « échanges ont considérablement progressé ces dernières années » et a considéré que les entreprises françaises qui « ont pris leur place en Russie » pouvaient « encore élargir cette influence et leur représentation ». L’important stock d’Investissements représentant quelque 10 milliards d’euros – la France est le 4e investisseur étranger en Russie - doit être amplifié selon lui, ainsi que l’investissement russe en France, plus modeste, d’un milliard d’euros. C’est dans ce but qu’a été signé un protocole d’accord entre les banques publiques française Caisse des dépôts et Consignations et russe Vnechekonombank et le Fonds russe des investissements directs « afin de faciliter l’accès des sociétés russes et françaises aux investissements à long terme » et de favoriser les échanges entre les deux pays.
Cependant si la présence française a progressé, la facture énergétique a engendré un déficit de la balance commercial de 2,9 milliards en 2012. Selon les autorités russes citées par L’Expansion, la coopération commerciale et économique entre les deux pays pourrait baisser cette année et c’est pourquoi François Hollande s’est rendu en Russie. Pourtant pas de contrat de grande envergure, mais différents accords ont été signés. Les grands domaines de coopération visés sont l’énergie, le gaz, l’automobile, le Chemin de fer avec un accord entre la SNCF et les chemins de fer russes sur la création d’un centre de recherche sur les lignes à grande vitesse, l’aéronautique avec EADS, le spatial qui a donné lieu à deux accords, l’industrie pharmaceutique, mais aussi les domaines militaire et nucléaire et ceux de l’agroalimentaire et du tourisme.
Vers une « vision commune » des questions internationales ?
Concernant les grands dossiers internationaux, François Hollande a mis en avant les points de convergence entre les deux partenaires, parlant de la « vision du monde » qu’ils ont « en commun », « attentifs » qu’ils sont « à régler les conflits par la négociation ».
Sur le Mali, François Hollande a remercié Vladimir Poutine pour son appui à l’intervention de la France et les deux hommes ont notamment discuté de la transformation de l’opération française en opération de maintien de la paix, à laquelle Vladimir Poutine apportera tout son soutien au conseil de sécurité. Quant au dossier iranien, le chef de l’État a insisté sur leur « analyse commune sur la question de la non-prolifération nucléaire » précisant que « tout doit être fait pour convaincre l’Iran de renoncer sans condition à l’accès à l’arme nucléaire » et ajoutant que les négociations n’ont pas encore abouti à une solution.
En ce qui concerne la question syrienne, selon le président de la République française, les deux États ont « progressé » car ils ont « le même objectif : éviter la dislocation de ce pays et ne pas laisser les terroristes profiter de ce chaos » et plaident tous deux pour un « dialogue politique ». Toutefois reste la principale pierre d’achoppement, le départ du président Bachar el-Assad, que Paris considère comme un préalable mais que Moscou rejette. Optimiste, François Hollande précise : « Nous divergeons encore mais nous pouvons trouver une voie commune » en trouvant « une partie qui puisse être acceptable » pour dialoguer avec l’opposition.
La grande absente : la question des droits de l’homme
Grande absente de cette visite, la question des droits de l’homme, alors que Human Rights Watch fait état en 2012 des « pires répressions » contre la société civile en Russie depuis la chute de l’URSS. Si François Hollande a rencontré cinq militants des droits de l’homme, ceux-ci regrettent qu’interrogé sur la loi Magnitski – loi américaine de 2012 interdisant l’entrée sur le territoire américain des responsables russes impliqués dans la mort du juriste Sergueï Magnitski et la saisie de leurs biens - il ait botté en touche. Dans une interview à la radio « Echos de Moscou », le président a pourtant écarté la possibilité pour la France d’adopter une telle législation arguant : « Nous ne faisons pas de loi spécifiques mais des lois générales », « nous ne désignons pas un pays en particulier, nous faisons appliquer la loi pour tous les pays et pour toutes les personnes qui relèvent de ce type de délit, voire de crime ».
Il semble bien que les questions économiques aient quelque peu évincé les questions des droits de l’homme. Mais lors de la conférence de presse, interrogé sur l’état des libertés fondamentales en Russie, le président français a déclaré : « La dimension de droits de l’homme est présente dans toute notre politique étrangère et partout où je vais j’ai à évoquer cette question et je le fais avec franchise et en même temps responsabilité », ajoutant « je n’ai pas à juger, je n’ai pas à évaluer, j’ai simplement à constater et lorsqu’il y a des manquements, je le fais pour qu’ils soient réglés et pas simplement brandis. » Et le président russe a confirmé qu’il n’existait « pas de sujet tabou » entre les deux partenaires, ajoutant qu’il ne considérait pas l’année 2012 comme une année difficile en matière des droits de l’homme, qu’il s’agissait d’une année électorale…
Anne-Laure Chanteloup