Gérard Araud est né le 20 février 1953 à Marseille. Fils d'une Lyonnaise et d'un Marseillais et petit-fils d'un paysan ariégois, il se définit comme n'étant « pas un héritier ». Élève brillant, il s'illustre très jeune par ses qualités diplomatiques. Il est diplômé en 1973 de l'Ecole polytechnique, puis de l'Ecole nationale de la statistique et de l’administration économique (ENSAE) en 1978 et de l'Institut d'études politiques (IEP), il intègre ensuite la prestigieuse Ecole nationale d'administration (ENA), dont il sort diplômé en 1982.
Un spécialiste du Proche-Orient au Quai d'Orsay
Spécialiste et passionné par la question du Proche-Orient, Gérard Araud intègre le le corps diplomatique et est nommé Premier secrétaire d'ambassade à Tel-Aviv en 1982. Il est ensuite affecté en 1984, à Paris, au centre d'analyse et de prévision du ministère des Affaires étrangères, où il est en charge des questions relatives au Moyen-Orient.
Après trois années passées au ministère des Affaires étrangères, de 1984 à 1987, Gérard Araud est envoyé de 1987 à 1991, à Washington, où il occupe le poste de deuxième conseiller d'ambassade.
En 1991, il revient à Paris, où il est tout d'abord Sous-directeur des affaires communautaires au ministère des Affaires étrangères ; puis nommé en 1993 conseiller diplomatique au cabinet de François Léotard, alors ministre d'Etat et ministre de la Défense.
En 1995, Gérard Araud rejoint Bruxelles et le commandement intégré de l'Otan. Il est représentant permanent adjoint à la délégation permanente de la France à l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord. Il occupe cette fonction jusqu'en 2000, puis est de nouveau nommé à Paris, où il devient directeur des affaires stratégiques, de la sécurité et du désarmement du ministère des Affaires étrangères.
Le diplomate aguerri nommé ambassadeur
En 2003, alors âgé de 50 ans, Gérard Araud est nommé ambassadeur de France en Israël. Jacques Chirac lui confie la mission de « rétablir des meilleures relations avec Israël ». Une tâche quelque peu ardue, notamment après des propos peu flatteurs à l'égard d'Israël qu'auraient tenus le nouvel ambassadeur. Quelques jours avant sa prise de fonction, un journaliste israélien affirme l'avoir entendu -au cours de la conférence annuelle des ambassadeurs au Quai d'Orsay- traiter le Premier ministre Ariel Sharon de "voyou" et l'Etat d'Israël de "paranoïaque". Après les nombreux démentis du principal intéressé, l'incident semble vite oublié. C'est surtout que le nouvel ambassadeur prend son travail très à cœur et n'hésite pas à aller à la rencontre des différentes communautés ou encore des parents du soldat Franco-israélien capturé, Gilad Shalit. Il donne « l'impression de comprendre certains points de vue israéliens », rapporte un journaliste israélien de Guysen News. La journaliste du quotidien Haaretz va encore plus loin en affirmant que Gérard Araud a « aimé sa mission en Israël et qu'il a surtout aimé être au contact des Israéliens ».
Aimer Israël est une chose, aimer Paris en est une autre. Il semble que le Marseillais qu'il est, et qui a d'ailleurs conservé son léger accent, ne porte pas la capitale dans son cœur. C'est pourtant à Paris, à l'été 2006, que Gérard Araud est rappelé. Il est alors nommé directeur général des Affaires politiques et de sécurité et secrétaire général adjoint du ministère des Affaires étrangères et européennes. L'un des postes les plus importants du Quai d'Orsay. A cette fonction, il est notamment en charge de la question relative au nucléaire iranien.
Le 15 juillet 2009, il est nommé ambassadeur et représentant permanent de la France auprès de l'Organisation des Nations Unies à New York. Sa mission auprès de l'ONU a été marquée par la négociation et le vote de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité sur l'Iran et le nucléaire, la Libye, la Côte d'Ivoire et plus récemment le Mali.
L'homme derrière le diplomate
Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, Gérard Araud ne laisse personne insensible et ses qualités diplomatiques sont unanimement reconnues. « L'ambassadeur est très apprécié au sein de l'organisation pour son talent de négociateur », souligne un journaliste de France-Amérique dans un long portrait qui lui est consacré.
Il a le sens de la formule « un ambassadeur, c'est une plante verte », « nous, diplomates, sommes des vautours qui nous nous nourrissons des conflits » et ses qualités de tribun sont indéniables. Tel une tragédien grecque, Araud a fait de la parole son art et de l'enceinte du Conseil de sécurité son oratoire. Il est reconnu par ses homologues comme « celui qui dit tout haut ce que les diplomates de haut rang pensent tout bas ». « Il ne se retient pas de dire ce qu'il pense, que ce soit dans les réunions privés ou publiés », confie un haut représentant anglais au Journal du Dimanche. Une attitude qui n'est pourtant pas du goût de tous ces collègues. Si sa mésentente avec l'ambassadeur du Brésil est de notoriété publique, ses difficiles relations avec son homologue américaine sont un peu moins médiatisées. Susan Rice ne semble guère apprécier les formules de l'ambassadeur français et son entêtement à faire passer des résolutions sur le Mali ou la République démocratique du Congo.
Gérard Araud donne parfois l'impression d'être un brin sûr-de-lui, têtu et déterminé. Agé de 60 ans, le diplomate qui en paraît dix de moins, est certainement mal compris. C'est un homme modeste -et charismatique- qui a été jusqu'à refuser le très prisé poste à l'ambassade de Washington pour conserver celui à l'ONU. Un poste qui lui convient mieux et qui correspond surtout à sa personnalité. Têtu peut être, il est celui qui n'hésite pas à taper du poing sur la table pour faire avancer les discussions, à court-circuiter ses collègues pour faire voter une résolution, ou à dénoncer le silence du Conseil de sécurité qu'il qualifie de « scandale » face aux massacres en Syrie. Déterminé, c'est certainement l'une des grandes qualités de l'ambassadeur qui lui a permis de faire adopter par le Conseil de sécurité une résolution sur le nucléaire iranien, une autre sur l'intervention militaire en Libye ou au Mali ou encore sur la Côte d'Ivoire, provoquant la chute de Laurent Gbagbo. « Des ambassadeurs, il y en a des bons et des moins bons. Lui est excellent », confiait le diplomate israélien Elie Barnavi au Journal du Dimanche.
Vanessa Gondouin-Haustein