Si l’on en croit certains députés, c’est une véritable disette qui devrait décimer les rangs de l’Assemblée nationale. Dans le rôle de l’affameur, Claude Bartolone, président de l’Assemblée, reste imperturbable, bien campé sur ses décisions de mise à la diète de ses congénères. En appelant à plus de « transparence » et de « sobriété » M. Bartolone a ainsi annoncé mardi la baisse de 10% de l'indemnité pour frais de mandat des députés (IRFM) assortie d’un gel du budget de l'Assemblée. Ces propos ont jeté un froid glacial sous les ors de la démocratie et provoqué le désespoir du chef de file des députés UMP, Christian Jacob : « Je pense qu'on ne fait pas avancer la démocratie en diminuant les moyens des parlementaires », a-t-il protesté. Frustration d’autant plus ressentie que ces annonces ont été faites sur fond de polémique autour de la présence au cabinet de Claude Bartolone de son épouse en tant que chargée de mission. Interrogé par Europe 1, Claude Bartolone a réfuté tout conflit d’intérêt en objectant assez joliment : « Je n'ai pas embauché ma femme, j'ai épousé ma collaboratrice ».
Une économie de 4,4 millions d’euros… réinvestie
En réalité, viser l’IRFM revient à chasser sur le territoire des députés. Cette indemnité qui s’élève à 6.412 euros sert par exemple au paiement du loyer de la permanence du député et s'ajoute à sa rémunération nette (5.189 euros) et à son enveloppe pour payer ses collaborateurs. Une somme rondelette qui souffre d’une absence de contrôle sur son utilisation, source de toutes les suspicions. Selon le député PS René Dosière, la commission pour la transparence de la vie politique a évalué dans son dernier rapport que l'IRFM contribuait à un enrichissement compris « entre 1.400 euros et 200.000 euros » sur un mandat. Cette baisse de 10% qui représente la coquette enveloppe de 4,4 millions d'euros sera affectée à améliorer la situation des assistants parlementaires, qui en ont bien besoin. Inutile de préciser que le précédent président de l'Assemblée, Bernard Accoyer, UMP a salué ces mesures, lui qui avait procédé à une baisse de 3% du budget établit aujourd’hui à un peu plus de 500 millions d'euros.
Toutefois, la transparence ne gagne pas la guerre au gré de cette mesure puisque le contrôle restera à la discrétion des députés simplement tenus de faire « une déclaration sur l'honneur », attestant qu'ils l'utilisent uniquement pour leurs frais de mandat. Un laxisme que regrette l'association Avaaz, qui s'est dite « déçue » avant d’ajouter : « c'est peut-être 10% de frais en moins, mais toujours 0% de transparence ».
Véronique Pierron