Quand le ministre du redressement productif a une idée derrière la tête… Et au gaz de schiste, Arnaud Montebourg y tient beaucoup. C’est mardi lors d’une audition à l’Assemblée Nationale qu’il a enfoncé le clou en déclarant « qu'on arrivera avec la technologie dans très peu de temps au gaz de schiste écologique, où il n'y a pas de pollution ». Il a ensuite bien sur, maintenu ses positions sur son exploitation en allant encore plus loin, il a lancé l’idée que celle-ci devrait être confiée à une « compagnie nationale publique » qui financerait notamment la transition énergétique. Conscient de l’écho que pourrait avoir de tels propos, il a insisté sur le fait qu’il s’exprimait « « à titre personnel ».
Les réactions ne se sont pas faites attendre. Depuis Bucarest, Jean Marc Ayrault a recadré le ministre du redressement productif. Il a martelé devant la presse qu’il était « exclu d'exploiter des gaz de schiste en France », et que « cette position sera évidemment maintenue » pour affirmer ensuite qu’il n’existait « qu'une politique au gouvernement ». La « position du gouvernement français consiste à travailler à préparer la transition énergétique, et le gaz de schiste n'est pas dans l'équation du gouvernement », a-t-il affirmé.
Aujourd’hui, seule la technique de la fracturation énergétique permet d’extraire les gaz ou le pétrole de schiste des sous-sols. Or, cette technique a été interdite au cours de l’été 2011 en raison des risques qu’elle faisait courir à l’environnement et notamment aux nappes phréatiques. La réaction du premier ministre a atteint aussi l’objectif de répondre à Delphine Batho, limogée la semaine dernière en quelques heures, qui demandait au gouvernement de lever « l'ambiguïté permanente qui est entretenue sur cette question ».
D’autres voix se sont élevées
Le premier ministre n’a pas été le seul à remettre Arnaud Montebourg à sa place et le nouveau ministre de l’écologie Philippe Martin – se servant des leçons passées – y a été aussi de sa salve réprobatrice à son encontre. Il a déclaré que la question de l'exploitation « écologique » des gaz de schiste « ne se pose pas », notamment à cause du bilan carbone « très négatif » des forages, en précisant que sa position n'était pas « personnelle », mais était bien « celle du gouvernement ». L’autre salve est venu du ministère de l’agriculture où Stéphane Le Foll a estimé que ce n'était « pas cohérent avec le choix fait lors de la conférence environnementale ». Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste au Sénat, a été encore plus loin en estimant que M. Montebourg était désormais « nuisible à l'écologie, nuisible au gouvernement ». Il « sait que ce n'est pas la position du gouvernement, il sait que ce n'est pas la position du président de la République (...) et il en rajoute une couche », a-t-il déclaré, évoquant une possible « provocation ».
Mais Hollande pas fondamentalement contre
Pourtant…En novembre dernier, François Hollande avait bien déclaré publiquement que la recherche de techniques alternatives à la fracturation hydraulique continuait et qu'il « prendr(ait) ses responsabilités » si une nouvelle technique apparaissait. « Je laisse les entreprises et les chercheurs y travailler et je prendrai mes responsabilités le moment venu » avait ajouté le chef de l’Etat. Selon un proche du chef de l’État cité par l’AFP, « Montebourg n'est pas en contradiction avec ce que dit François Hollande » sur la recherche de techniques propres pour extraire le gaz de schiste. Puis s’exprimant sur la compagnie publique, le proche de François Hollande déclare : « c'est l'opinion de Montebourg » tout en concédant que ce nouvel effet de manche du vibrionnant ministre n’avait « rien à voir avec les déclarations de Batho qui, elle, a rompu la règle de solidarité sur le budget ».
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Gaz de schiste (Les Echos)
Fracturation énergétique (Terra Eco)